Rectifier le rythme de remplacement de la centrale énergétique cellulaire, la mitochondrie, telle est la nouvelle cible thérapeutique d’un groupe de recherche de l’Université Ben Gourion du Néguev. Diabète de type II, maladies dégénératives mais aussi cancer, les applications possibles sont innombrables.
Pour comprendre l’approche suivie par un groupe de l’Institut National de la Biotechnologie du Néguev (NIBN), faisons une analogie : les centrales énergétiques d’un pays, une fois construites, permettent d’alimenter celui-ci en électricité durant une période définie par leur durée de vie ; une fois leur durée de vie maximale atteinte, il est nécessaire de construire une nouvelle centrale sous peine de voir la multiplication des coupures impacter la vie et l’économie d’une partie du pays, voir du pays tout entier.
C’est exactement ce qui se passe chez les cellules pancréatiques bêtas impliquées dans le diabète de type II : leur centrales énergétiques, les mitochondries, vieillissent. Le rythme de remplacement des veilles mitochondries par des nouvelles est appelé turn-over. Or, chez les cellules bêtas des patients atteints de diabète II, ce turn-over est trop faible. Les cellules ne sont pas remplacées à temps, ce qui entraine des dysfonctionnements, puis la mort cellulaire.
Le projet dirigé par la Dr Fernanda Cerqueira et le Dr Las consiste à faire l’hypothèse que, si l’on rectifie le turn-over des cellules bêtas chez des patients atteints de diabète II, il serait possible d’empêcher leur apoptose et, in fine, de traiter la maladie. Néanmoins, un problème majeur se posait encore récemment : comment suivre le turn-over des mitochondries ? Si des solutions existent, elles sont rarement appropriées à la réalisation d’un criblage d’un très grand nombre de molécules issues d’une bibliothèque de candidats potentiels. Une récente avancée dans ce domaine a permis à l’équipe de développer un outil pour jouer ce rôle : une protéine-sonde. Jeune, cette protéine-sonde teint les mitochondries en vert fluorescent. Après 24h environ, elle devient rouge fluorescente. Cette fluorescence peut être automatiquement mesurée par un instrument optique et rend donc possible un criblage haut débit. Le ratio de mitochondries rouges sur vertes permet alors d’indiquer des variations dans le turn-over de ces mitochondries.
Ainsi, l’équipe de chercheurs a récemment criblé toute la bibliothèque de candidats potentiels thérapeutiques de l’unité de recherche thérapeutique de l’INCPM (Centre National Israélien de Médecine Personnalisée) de l’Institut Weizmann, soit environ 20 000 molécules. Parmi ces 20 000 substances, seulement trois furent retenues (les résultats ne sont pas encore publiés) et font aujourd’hui l’objet d’analyses plus poussées afin de comprendre leur mécanisme d’action avec peut-être à la clef, la découverte d’une nouvelle voie thérapeutique pour des essais cliniques.
A noter qu’un faible turn-over mitochondriale est une conséquence connue du vieillissement et n’est pas seulement impliqué dans le diabète de type II mais aussi dans la plupart des maladies dégénératives, rendant ce projet d’autant plus intéressant. Par ailleurs, les chercheurs ont observé que certaines des molécules criblées avaient l’effet inverse, à savoir un ralentissement du turn-over des mitochondries. Or, l’accélération du turn-over est typique des cellules cancéreuses. Le groupe a donc décidé d’investiguer en parallèle ces 40 molécules pouvant potentiellement devenir des outils thérapeutiques anti-cancer.
En savoir plus :
- Prof Varda Shoshan Barmatz du NIBN, « guide » du projet
- Les protéines sondes
- Le rôle de la mitochondrie dans le diabète de type II
- Le centre de recherche thérapeutique (Drug Discovery Unit) de l’institut Weizmann des Sciences
Rédacteur : Arthur Robin, doctorant à l’Université de Tel Aviv avec ses remerciements au Dr Fernanda Cerqueira
Source bvst