L’israélien Yosef Abravomitz, emblématique président de Gigawatt Global, avait appelé de ses vœux « un miracle de Hanouka pour que la COP21 réussisse ». Et c’est gagné ! Dans un marathon de plus de 300 heures, du javais vu, les pays participants ont adopté à l’unanimité un accord historique, contraignant et équilibré, lors de la 21ème Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. La COP21 a créé une dynamique sans précédent, fondement essentiel d’une évolution des mentalités qui va préparer les populations et les acteurs du privé à accepter des ajustements impératifs pour préserver la vie humaine sur Terre.
Robert Zbili, président du KKL France a confié à Israël Science Info : « c’est une réussite à trois niveaux : l’accord global entre les parties climat est une victoire pour la planète et pour Israël qui a participé aux négociations ; c’est aussi une expérience extraordinaire car le stand du KKL, principal acteur d’Israël à la COP21, a reçu des représentants de nombreux pays, notamment d’états traditionnellement opposés à Israël ; sur le plan de la vitrine technologique, c’est un succès très important pour les sociétés israéliennes présentées à COP21 et au Grand Palais à Paris. Même si l’empreinte carbone d’Israël n’est pas significative comparée à la Chine, l’Inde et les USA, Israël a pu montrer et prouver l’universalité de ses innovations dans le domaine de la protection de l’environnement tout au long de la réunion planétaire la plus importante jamais organisée. COP21 a suscité une prise de conscience mondiale et un engagement sans précédent en vue de protéger la planète par la solidarité et l’action commune ». Robert Zbili a salué au passage le formidable travail du KKL Jérusalem qui a mobilisé une nombreuse équipe à cette occasion composée, entre autres, de Karine Bolton et Gil Siaki.
Parmi les nombreux pays qui ont échangé avec les exposants du KKL, il y avait entre autres : la France, la Suède, la Turquie, le Pérou, le Punjab, la Tanzanie, le Sud Soudan, le Soudan, le Kenya, le Chili, les USA, le Ghana, le Pakistan, le Maroc, l’Algérie, l’Ethiopie, le Monténégro, l’Inde, le Japon, Taïwan, la Chine, la Belgique, le Canada, le Kazakhstan…
Les engagements du gouvernement israélien (INDC) pour 2030 semblent donc modestes a priori (réduction des émissions de gaz à effet de serre par habitant à 7,7 teqCO2, réduction de 25% des émissions de gaz à effet de serre, utiliser les énergies renouvelables pour atteindre 17% de l’électricité du pays, diminution de 20% de l’utilisation d’un véhicule privé…), mais cela s’explique peut-être par la faible empreinte écologique d’Israël. Le ministre israélien de la protection de l’environnement Avi Gabbay a souligné que « les innovations israéliennes peuvent aider les états à atteindre les objectifs convenus à Paris. Cet accord est un signal fort envoyé aux investisseurs et aux marchés liés aux domaines de l’efficacité énergétique, des énergies renouvelables et des alternatives aux combustibles polluants. Israël peut prendre une part importante dans ce virage technologique. »
La présence d’Israël a donc été très remarquée par la qualité des innovations présentées qui apportent de réelles solutions au réchauffement climatique, dans la droite ligne du succès du salon « Israël Innovation » organisé par Esther Amar, fondatrice d’Israël Science Info, lors la grande journée du KKL le 2 février 2014 au Palais Brongniart.
La prochaine COP (COP22) se déroulera en 2016… au Maroc.
Les plus
La référence à 1,5°C. L’objectif de l’Accord est de limiter la hausse de la température moyenne globale « bien en dessous » de 2°c par rapport aux niveaux pré-industriels assortie d’une indication que les efforts doivent être maintenus pour viser un objectif de 1,5°C seulement. C’était un des points cruciaux pour les pays les plus vulnérables.
Un objectif de long terme clair. La trajectoire pour parvenir à la limitation de hausse de température consiste à atteindre un pic d’émissions de gaz à effet de serre « dès que possible » reconnaissant que cela prendra plus longtemps pour les pays en développement. Puis, « conformément aux meilleures données scientifiques disponibles » il s’agira de parvenir dans « la seconde moitié du siècle » à un équilibre entre les émissions anthropogéniques (dues aux activités humaines) et l’absorption par les puits de gaz à effet de serre. « C’est un signal fort pour les marchés, commente Michael Jacobs du New climat economy. Nous avons un signal économique vers les investissements bas-carbone. »
Un mécanisme de révision post-2020 heureusement bien cadré. Les pays ont soumis à la COP21 des engagements pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Et il a été montré que la somme des contributions nationales fournies par la plupart des pays à la COP (INDC) nous mène sur une trajectoire de 3°C et non pas 2°C ni encore moins 1,5°C. Selon l’Accord, les INDC devront donc être révisés à la hausse tous les cinq ans à partir de 2020. Avec un premier état des lieux mondial de l’avancée des politiques globales et de leurs résultats en 2023. Dès 2018 un « dialogue facilitateur « , fera le premier état des lieux des efforts faits. Une sorte de répétition générale avant les inventaires post 2020.
Un plancher de 100 Milliards de dollars. Le fonds de 100 milliards de dollars par an est inscrit dans les décisions et non plus dans l’Accord (voir encadré ci dessous). Il doit être abondé dès que possible et revu à la hausse après 2020.
Pertes et dommages. Cette partie fait l’objet d’une partie distincte, comme le souhaitaient les pays les plus vulnérables. Elle garantirait des mécanismes d’entraide et d’assurance pour les pays les plus vulnérables au changement climatique. Mais n’ouvre pas droit à compensation.
Les moins
Les finances post 2020 sans chiffre. Il n’y a plus de référence chiffrée dans l’Accord de Paris. La mention des 100 MD$ pour le fonds vert est remontée dans les décisions (voir encadré ci dessous).
Pas de révision des engagements avant 2020. La coalition des « pays ambitieux » pour le climat, High ambition coalition, qui compte 80 pays (dont des gros émetteurs comme les USA et l’US), prendrait peut-être l’engagement, dans une déclaration à côté de l’Accord, de réviser ses INDC avant 2020. C’est en tout cas ce qu’appelle de ses vœux la fondation Nicolas Hulot.
Les droits humains restent dans le préambule. Mais n’entrent pas dans l’Accord de Paris proprement dit (voir encadré).
Les plus ou moins
Un système unique de transparence. C’est une avancée par rapport au système actuel, différencié selon les pays développés ou en développement. « Mais il va devoir être suivi de près, commente Alexandra Deprez, de l’IDDRI. » Si la partie « review » (infos envoyées par les pays) est clairement unique, la partie « reporting » (rapports d’experts mandatés par l’ONU) est plus ambiguë et encore plus flexible ». La vraie bataille va donc être de fixer les modalités techniques qui seront décidées dans les prochaines COP.
Les manques
La référence au secteur de l’aviation. Elle a été retirée de l’Accord, sur la demande entre autres de Singapour. « Le manque de référence à l’aviation est dommage, mais d’autres processus de régulation sont en cours » commente Thomas Spencer de l’IDDRI.
Le prix du carbone. Il a été retiré de l’Accord aussi. Probablement une concession faite à l’Arabie saoudite et au Vénézuela. Mais cette absence dans le texte n’empêchera pas les marchés carbone-déjà en route- de voir le jour selon la carte qu’en a établi Sciences et Avenir, ni la taxation du carbone de devenir une réalité économique pour les chefs d’entreprises.
Petit point technique : les décisions concernent tout ce qui doit ou peut être fait avant la mise en œuvre de l’Accord, en 2020. Cette partie est signée par tous les pays. L’Accord, lui, en annexe, devra, pour être valide, être ratifié. A chaque pays de le ratifier dans sa propre législation entre avril 2016 et avril 2017. Il ne pourra entrer en vigueur que lorsqu’un minimum de 55 pays représentant 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre l’auront ratifié.