Zavit. Des chercheurs du KKL-JNF et de l’Institut Migal (Galilée, Israël) ont trouvé un moyen naturel d’accélérer la croissance des pins par symbiose en utilisant des champignons comestibles durant les premières années de croissance. Tout au long de l’histoire de l’humanité, les champignons ont joué un rôle essentiel à travers le monde dans de nombreuses cultures anciennes. Les premières cultures grecques, romaines et chinoises connaissaient leur valeur nutritionnelle innée et les incorporaient dans leurs cuisines respectives. Aujourd’hui, on sait pourquoi les champignons étaient si appréciés. Non seulement ils sont dépourvus de cholestérol et faibles en calories, glucides, lipides et sodium, mais ils regorgent de nombreux nutriments importants associés à de nombreux avantages pour la santé. Le sélénium, le potassium, la riboflavine, la niacine, la vitamine D, diverses protéines, les fibres et les composés bioactifs contenus dans les champignons renforcent efficacement notre système immunitaire et permettent de traiter et prévenir de nombreuses maladies et affections sévères comme la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, le cancer et l’hypertension.
Selon la nouvelle étude du KKL-JNF et de l’Institut Migal, les avantages des champignons comestibles ne se limitent pas uniquement aux humains : les arbres poussent plus vite lorsqu’ils sont contaminés par certains types de champignons comestibles. « Le KKL-JNF encourage le phénomène des forêts comestibles et souhaite créer des forêts avec des champignons comestibles mycorhiziens intéressants à récolter », explique le Dr Ofer Danay, directeur de la recherche champignons et truffes à l’institut Migal et co-auteur de la nouvelle étude. « Certaines espèces de pins, en particulier le pin parasol (Pinus pinea), ne survivent pas dans les sols calcaires, type de sol le plus courant en Israël », explique Ofer Danay. « Par conséquent, on tente à présent d’aider le pin parasol à faire face à ces difficultés en le contaminant avec des champignons mycorhiziens afin d’augmenter sa part dans les pinèdes, notamment parce qu’il est moins sensible aux ravageurs du pin et causer des problèmes de santé aux humains. Au-delà, augmenter la quantité de champignons dans le sol peut aussi aider à lutter contre la crise climatique ».
Weizmann : champignons mycorhiziens et CO2
« Selon les recherches du Dr Tamir Klein de l’Institut Weizmann, les champignons mycorhiziens réduisent la perte de carbone fixé dans le sol et réduisent la quantité de dioxyde de carbone émise dans l’atmosphère », explique Ofer Danay. Avec les spores de deux champignons comestibles populaires, Suillus collinitus et Lactarius deliciosus, les chercheurs ont infecté environ 120 pousses de trois espèces d’arbres différentes : le pin pignon (Pinus pinea), le pin de Calabre (Pinus brutia) et le pin de Jérusalem, également communément appelé comme le pin d’Alep (Pinus halepensis). Ils ont examiné comment l’infection fongique affecte les arbres au cours des deux premières années de leur vie avant qu’ils ne soient transférés dans un champ pour la plantation.
«Dès le stade de la pépinière, nous avons constaté que les arbres infectés par des champignons mycorhiziens se développaient mieux que les arbres du groupe témoin, qui n’étaient pas infectés par le champignon», explique Ofer Danay. L’étude a montré que les jeunes arbres infectés par trois espèces de pin échantillonnées étaient plus grands et que le diamètre de leur tronc était plus large. L’effet le plus important a été observé chez les espèces de pin de Jérusalem, qui étaient 180 % plus grosses que le groupe témoin. Cela a été observé ensuite chez le pin de Calabre, qui a montré une amélioration de 160 % en hauteur et en diamètre, puis chez le pin pignon, qui a présenté une augmentation de croissance de 124 %. Une croissance stimulée à ce degré est de bon augure pour les efforts de reboisement et de boisement.
Un lien de réciprocité
Pourquoi les arbres parasités par des champignons poussent-ils mieux ? La réponse réside dans le principe de la symbiose, ou de relation mutuellement bénéfique entre deux organismes. Dans ce cas, le champignon, qui enveloppe étroitement les racines de l’arbre, aide à fournir de l’eau et des nutriments essentiels comme le phosphore, le fer et le magnésium du sol pour le développement précoce de l’arbre. En retour, le champignon peut absorber les nutriments et les sucres dont il a besoin pour construire son organisme, que l’arbre produit par photosynthèse.
En raison de la présence de diverses espèces de champignons dans les sols, les racines des arbres s’entremêlent régulièrement et naturellement avec des champignons mycorhiziens. Grâce à l’utilisation de méthodes moléculaires, le Dr Danay pense qu’il est intéressant d’identifier les champignons mycorhiziens présents dans le sol afin de mieux choisir les espèces d’arbres qui peuvent le mieux les héberger pour assurer un développement et une survie rapides des arbres forestiers. « Cela permettra également de conserver les champignons, dont certains peuvent être utilisés pour l’alimentation et dont certains sont même en danger d’extinction ».
Malgré le risque que les arbres finissent par être infectés par le champignon «naturellement», il vaut mieux infecter les pousses pendant qu’elles sont dans la pépinière. « Nous prévoyons que les arbres infectés atteindront une taille qui leur permettra de démarrer et de produire des corps multiplicatifs des champignons mycorhiziens comestibles plus tôt que la situation actuelle», explique-t-il.
Au-delà du plaisir de l’expérience de recherche de nourriture et des multiples profils de saveurs de nombreux champignons comestibles, une identification erronée peut avoir des conséquences graves et potentiellement mortelles. « Chaque année, des cas d’empoisonnement sont signalés en raison d’une identification et d’une collecte incorrectes de champignons, pouvant même entraîner la mort », explique Ofer Danay. Il souligne l’importance de la prudence et de la rapidité lors de la collecte. « Celui qui cueille des champignons doit connaître parfaitement le champignon qu’il cueille et s’assurer de son identification. Il n’y a pas de règles empiriques sur le sujet, donc en cas de doute, évitez complètement de cueillir et de manger le champignon. Un autre point important est la nécessité d’éviter de trop récolter les champignons car cela peut nuire à leur capacité de récupération et de reproduction. « Ils doivent être récoltés de façon raisonnable – en petites quantités – afin que les champignons puissent continuer à se développer et à se répandre », explique Ofer Danay.
« Je reçois parfois des photos de personnes revenant de la cueillette avec des seaux pleins de champignons et laissant derrière elles un sol nu. C’est très problématique. » La préservation des champignons comestibles mycorhiziens qui poussent dans les forêts est particulièrement importante aujourd’hui en raison de la situation précaire de notre climat. « Ces dernières années, il y a eu une diminution de l’abondance et de la diversité de ces espèces de champignons dans la nature en raison de la surexploitation et de la crise climatique », explique Ofer Danay. « Il est important de préserver la biodiversité du champignon au profit de la santé de la forêt et pour la nôtre», conclut-il.
Publication dans yaar magazine
Auteur : Racheli Wacks pour l’agence Zavit
Traduction/adaptation Esther Amar pour Israël Science Info