« La sixième extinction de masse a déjà commencé et les activités humaines font disparaître à jamais des centaines de milliers d’espèces. Pour inverser la tendance de la crise de la biodiversité, nous devons identifier les régions et les espèces qui ont le plus besoin de nos efforts de conservation », déclare le Dr Gopal Murali, chercheur principal, étudiant post-doctorant du Dr Uri Roll à l’Université Ben Gourion du Néguev.
Dans cette nouvelle étude, Uri Roll et ses collègues se sont concentrés sur les espèces présentant deux caractéristiques distinctes particulièrement favorables pour les efforts de conservation. Primo : ils sont confinés dans un seul endroit très petit et sont donc confrontés à un plus grand risque d’extinction. Secundo : ils sont uniques sur le plan de l’évolution – ils n’ont pas de proches parents sur « l’arbre de vie », et leur perte représentera une perte de millions d’années d’évolution. Les espèces qui possèdent ces deux attributs sont donc d’une grande importance pour la conservation car elles représentent des composantes uniques et menacées de la biodiversité.
Pour identifier les régions abritant ces espèces (régions de haut endémisme phylogénétique), ils ont collecté des données concernant les relations évolutives et la répartition géographique de 84 % des espèces de vertébrés terrestres (environ 30 000 espèces d’amphibiens, d’oiseaux, de mammifères et de reptiles). Ils ont ensuite cartographié les « points chauds » mondiaux de ces espèces pour comprendre les conditions uniques qui les soutiennent et évalué leur protection et leurs menaces actuelles. Le Dr Roll et ses collègues ont découvert que les points chauds d’endémisme phylogénétique se produisent principalement dans les régions tropicales montagneuses et dans l’hémisphère sud, le long des chaînes de montagnes et des îles.
En combinant les points chauds des amphibiens, des mammifères, des reptiles et des oiseaux, ils occupent 22% de la masse continentale totale. Les îles des Caraïbes, l’Amérique centrale, les Andes, l’est de Madagascar, le Sri Lanka, le sud des Ghâts occidentaux en Inde et la Nouvelle-Guinée étaient importants pour les quatre groupes. Certaines de ces régions ont déjà été priorisées pour des actions de conservation, mais certaines sont en dehors des centres de biodiversité bien connus. Par exemple, les montagnes d’Asir en Arabie saoudite abritent des oiseaux de petite taille, uniques sur le plan de l’évolution, et le Maroc abrite des reptiles endémiques phylogénétiquement.
« Dans l’ensemble, nos résultats soutiennent l’idée que les montagnes tropicales jouent un rôle important dans la création et le maintien de la biodiversité », explique le Dr Murali. Ils ont également quantifié la manière dont les activités humaines et le changement climatique menacent ces points chauds. De manière alarmante, ils ont constaté que les bâtiments, les routes, la conversion de terres naturelles à des fins urbaines et agricoles, la forte densité de population humaine et le changement climatique rapide sont plus élevés dans ces points chauds que dans les régions en dehors d’eux.
De plus, ils ont découvert que la plupart des hotspots ne sont pas suffisamment protégés. Environ 70 % des régions du hotspot ont moins de 10% de chevauchement avec des aires protégées. Certaines de ces régions, qui nécessitent une action de conservation urgente, sont le sud des Andes, la Corne de l’Afrique, l’Afrique australe et les îles Salomon. « Notre étude montre que de nombreuses espèces particulièrement rares, qui peuvent jouer des rôles distincts dans leurs écosystèmes, seront probablement parmi les premières à disparaître en raison du changement global« , selon les chercheurs, « à ce jour, la plupart des stratégies de conservation se concentrent encore sur les régions riches en espèces ou les espèces phares, et peuvent passer à côté de régions avec des espèces particulièrement rares dont l’histoire évolutive est unique. »
Le Dr Uri Roll et son étudiant post-doctoral, le Dr Gopal Murali, sont membres du Département d’écologie du désert Marco et Louise Mitrani de l’Institut suisse de recherche environnementale et énergétique des zones arides des Instituts Jacob Blaustein pour la recherche sur le désert sur le campus Sde Boker de l’Université Ben Gourion du Néguev. Parmi les autres chercheurs figuraient le Dr Rikki Gumbs du Département des sciences de la vie, Imperial College London et la Société zoologique de Londres et le Dr Shai Meiri de l’Université de Tel Aviv. La recherche a été soutenue par l’Israel Science Foundation (ISF) (numéro de subvention 406/19).
Traduction/adaptation Esther Amar pour Israël Science Info