Une nouvelle méthode mise au point par le Dr. Dana Bar-On, sous la direction du Prof. Uri Ashery, directeur de l’Ecole des neurosciences de l’Université de Tel-Aviv ouvre la voie à un diagnostic précoce qui permettra un traitement de la maladie de Parkinson dès son premier stade. L’étude, basée sur une technologie innovante de microscopie à super-résolution, a permis d’identifier, dès le début de la maladie, des dépôts de protéines toxiques de petite taille qui se multiplient avec sa progression.
NDLR : En France, fin 2015, 160 000 patients parkinsoniens étaient traités, avec environ 25000 nouveaux cas par an, dont 17% étaient âgés de moins de 65 ans. C’est la deuxième maladie neurodégénérative après la maladie d’Alzheimer (source SPF). La maladie de Parkinson fait partie du groupe de pathologies définies comme « synucléopathies » caractérisées par la présence d’agrégats anormaux de protéines au sein des cellules nerveuses : les « corps de Lewy ». L’un des composants principaux est la protéine alpha-synucléine, une protéine très abondante dans l’organisme, en particulier dans le cerveau.
La recherche a été réalisée en collaboration avec l’Université de Cambridge en Angleterre, l’Institut Max Planck de Göttingen et l’Université Ludwig Maximilian de Munich en Allemagne.
Le Prof. Ashery explique : « La maladie de Parkinson se caractérise par la formation de dépôts importants dans le cerveau d’une protéine appelée alpha-synucléine. Ces dépôts sont liés à un processus graduel de mort des cellules dans la région du cerveau central dite substance noire (substantia nigra). Cette mort cellulaire entraîne une baisse de la libération dans le cerveau de la dopamine, neurotransmetteur très important du système nerveux, provoquant des troubles moteurs, puis cognitifs. Le problème est que, avec les méthodes classiques, ces dépôts ne peuvent être observés que lorsqu’ils déjà sont relativement importants, c’est-à-dire à un stade avancé de la maladie, lorsque 75% des cellules de matière noire sont déjà mortes et ne peuvent plus être traitées. Nous avons cherché un moyen de diagnostiquer la maladie à un stade beaucoup plus précoce et envisagé un traitement possible de cette affection grave, considérée jusqu’à présent comme incurable ».
Eliminer les agrégats toxiques tant qu’ils sont petits
Au cours de l’étude, les chercheurs partenaires de l’Université de Cambridge ont créé en laboratoire un modèle de souris exprimant la protéine alpha-synucléine avec une mutation entraînant la formation spontanée d’agrégats, forme de cette protéine qui a été retrouvée sur des patients atteints de Parkinson après autopsie. Utilisant une technologie de microscopie perfectionnée, les chercheurs de l’Université de Tel-Aviv ont constaté que des petits agrégats d’alpha-synucléine apparaissaient dans les cellules de la substance noire dès le début de la maladie. « Nous avons également noté que ces petits dépôts augmentaient avec le développement de la maladie, contrairement aux agrégats de grande taille dont le nombre reste constant. Nous en avons conclu que ces petits agrégats constituent la substance toxique responsable de la maladie. De plus, nous pensons qu’il est possible que la formation des gros agrégats ne soient qu’un mécanisme de compensation du cerveau dans sa lutte contre les petits dépôts toxiques », explique le Dr. Bar-On.
Suite à cette découverte, un chercheur associé de l’Institut Max Planck en Allemagne, spécialisé dans le développement d’agents anti-agrégats, a réussi à développer une substance appelée Anle 138b, qui empêche l’accumulation de dépôts d’alpha-synucléine. Les souris traitées avec cette substance ont vu leur état s’améliorer de manière significative: la libération de dopamine dans leur cerveau a augmenté, et leur comportement est redevenu normal. En parallèle, les chercheurs ont constaté que le médicament provoquait la décomposition des petits dépôts de la protéine, ce qui réduisait apparemment leur toxicité.
Vers un nouveau médicament
« Nous avons découvert un mécanisme central de la maladie de Parkinson, inconnu jusqu’à présent, et trouvé une substance qui le neutralise et pourra servir de base au développement d’un médicament. Ce médicament potentiel en est actuellement au stade d’essais cliniques. Nous recherchons de même un moyen de détecter les petits agrégats d’alpha-synucléine au début de la maladie chez l’être humain. Comme nous ne pouvons pas pénétrer directement dans le cerveau, nous recherchons ces dépôts dans des tissus ou excrétions du corps plus accessibles, comme des échantillons de peau, et peut-être même dans les larmes des patients et des patients potentiels », conclut le Prof. Ashery.
Publication dans Acta Neuropathologica, 5 juin 2019
Auteur : Sivan Cohen-Wiesenfeld, PhD, Rédac’chef de la newsletter des Amis français de l’Université de Tel Aviv