Les astronomes l’ont enfin observé : la fusion de deux étoiles hyper denses, des « étoiles à neutrons », engendre bien des ondes gravitationnelles, c’est-à-dire des déformations de l’espace-temps. La cinquième aura été la bonne ! La plus récente détection d’ondes gravitationnelles, le 17 août dernier, par les instruments Virgo aux Etats-Unis, et Ligo en Italie, a été accompagnée par la détection d’un flash lumineux enregistré par des télescopes spatiaux… Et elle restera dans l’histoire !
C’est la première détection d’une fusion d’étoiles à neutrons via les ondes gravitationnelles : les quatre précédentes concernaient des trous noirs.
Un israélien, le Pr Avishay Gal-Yam, du département des particules en physique et astrophysique à l’Institut Weizmann est impliqué à haut niveau dans ces travaux (NDLR Israël Science Info).
Comme eux, les étoiles à neutrons sont des restes d’étoiles qui ont explosé en supernova. Mais elles sont de nature complètement différente : des agrégats de neutrons ultra-denses, si denses que quand deux d’entre-elles se tournent autour l’une autour de l’autre, elles sont censées provoquer des torsions de l’espace-temps qui se propagent sur des années-lumière… voilà, c’est désormais prouvé !
La double détection que tous les astrophysiciens attendaient
Et ce n’est pas tout : quand elles se fracassent l’une sur l’autre, la théorie prévoyait qu’elles explosent dans ce qui est l’un des phénomènes les plus violents de l’Univers : « un sursaut gamma court ». Eh bien, c’est un tel flash qui a été détecté dans la foulée par les satellites en rayon gamma Fermi (de la NASA), et Integral (de l’ESA) ! La preuve est faite : les sursauts gamma courts ont donc bien pour origine la coalescence d’étoiles à neutrons. « Cette double détection, c’est ce que tout le monde attendait, explique Frédéric Daigne, de l’institut d’astrophysique de Paris. C’était évident que tout le monde allait suivre l’événement »
17 août 2017 : deux dépêches arrivent coup sur coup
En effet, le 17 août dernier, les télescopes du monde entier reçoivent les deux dépêches coup sur coup. La première, en provenance des détecteurs d’ondes gravitationnelles Ligo et Virgo, qui annonce la détection, à 12 h 41, de la coalescence de deux étoiles à neutrons d’environ 1,5 masse solaire dans le ciel de l’hémisphère sud : GW170817. La seconde, en provenance des satellites Fermi (NASA) et Integral (ESA), qui signale un sursaut gamma court juste 1,7 seconde plus tard : GRB170817a.
Dès lors c’est le branle-bas de combat : pas moins de 70 télescopes dans le monde sont tournés vers l’origine commune des signaux : un point lumineux, en périphérie de la galaxie NGC4993, à 130 millions d’années-lumière de nous. Il s’éteint lentement, son évolution est suivie de près pendant les dix jours suivants… Encore gagné : elle correspond en tout point à celle d’une « kilonova », un phénomène théorique qui n’avait jamais été observé auparavant !
La « kilonova », un phénomène jusqu’ici théorique, devient réalité
Les kilonovae sont des explosions censées emboîter le pas aux sursauts gamma courts. En se fracassant l’une sur l’autre, les étoiles à neutrons libéreraient des neutrons en quantités monstrueuses, qui s’assembleraient pour former une foule d’éléments radioactifs, dont le rayonnement provoquerait la kilonova. C’est aussi là que se forgeraient les éléments les plus lourds de l’Univers : le platine, l’uranium, l’argent, l’or !
« On n’a pas la preuve directe que de ces éléments ont été synthétisés lors de GW170817, mais toutes les observations sont compatibles avec les kilonovae telles qu’on les concevait », explique Frédéric Daigne qui, comme ses confrères, est extrêmement enthousiasmé par cette détection. « C’est une observation exceptionnelle qui valide un scénario sur lequel nous travaillons depuis des années, en tant que théoricien je trouve ça fantastique ! »
Auteur : Science et Vie
pourPublication dans Nature, 16 oct. 2017