L'Université de Tel Aviv et le CNRS identifient des gènes capables de protéger les cellules contre Zika
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Le virus Zika est un Flavivirus transmis par les moustiques du genre Aedes. Il est répandu en Asie et en Afrique, et a émergé en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Il affecte pas moins de 60 millions de personnes dans le monde. La maladie qu’il provoque se manifeste trois à douze jours après la piqûre de l’insecte vecteur par divers symptômes : fièvre, maux de tête, éruption cutanée, fatigue, douleurs musculaires et articulaires, des malformations graves du fœtus… (Institut Pasteur)
Des chercheurs de l’Université de Tel-Aviv, sous la direction du Dr. Ella Sklan du Département de microbiologie et d’immunologie clinique de la Faculté de Médecine, ont identifié des gènes capables de protéger les cellules contre les infections par le virus Zika, et de régénérer les cellules infectées. La recherche, réalisée en coopération avec le Dr. Nabila Jabrane-Ferrat du CNRS de Toulouse, pourrait dans l’avenir déboucher sur la mise au point d’un traitement du virus et d’autres infections.
« Le virus Zika a déjà touché plus de 60 millions de personnes dans le monde, principalement en Amérique du Sud. Il a des conséquences potentiellement dévastatrices pour les femmes enceintes et leurs futurs bébés, dont beaucoup naissent avec une microcéphalie grave et d’autres anomalies neurologiques ou du développement. Il n’existe actuellement aucun vaccin ni traitement spécifique contre ce virus », rappelle le Dr. Sklan.
La présente étude est basée sur la technique dite « d’édition du génome » développée dans les années 2000 et connue sous le nom de CRISPR-Cas9, un enzyme capable de couper les molécules d’ADN avec précision en n’importe quel emplacement. Cette technique dite des « ciseaux moléculaires » s’appuie sur les propriétés de l’enzyme bactérien Cas9, capable de localiser des gènes à des emplacements spécifiques le long du génome humain et de les modifier. Les chercheurs ont utilisé une version adaptée de ce système, appelée activation CRISPR, réalisée en modifiant génétiquement le Cas9, de manière à permettre l’expression de gènes spécifiques à un emplacement voulu dans l’ADN.
Un gène protecteur
« L’activation CRISPR peut être utilisée pour identifier des gènes protégeant contre l’infection virale. Nous avons utilisé ce système pour activer tous les gènes du génome de cellules que nous avons cultivées ; puis nous avons ensuite infecté ces cellules avec le virus Zika. Nous avons pu remarquer qu’alors que la plupart des cellules sont mortes après l’infection, certaines ont survécu, en raison de la surexpression de certains gènes protecteurs. Utilisant ensuite les méthodes de séquençage génétique dites de nouvelle génération, ainsi que l’analyse bio-informatique, nous avons pu identifier un certain nombre de gènes permettant cette survie, en nous focalisant sur l’un d’entre eux en particulier, appelé IFI6, dont le rôle protecteur avait déjà été identifié lors d’un précédent criblage, réalisé par un autre groupe de recherche, vis-à-vis d’autres virus », explique le Dr. Sklan.
« Et en effet, ce gène IFI6 a montré une capacité de protection élevé également contre le virus Zika, à la fois en protégeant les cellules contre l’infection et en prévenant la mort cellulaire », a poursuivi le Dr. Sklan.
En collaboration avec le Dr Nabila Jabrane-Ferrat du CNRS de Toulouse, les gènes identifiés ont ensuite été transférés dans des tissus de placenta humain qui servent de passerelle pour la transmission virale au fœtus, et il s’est avéré qu’ils pouvaient également jouer un rôle protecteur contre le virus dans ces tissus. « Le mode d’action du gène IF16 est pour le moment encore inconnu; lorsque l’on pourra le reproduire, il pourra servir de base à la mise au point d’un nouveau traitement antiviral pour lutter contre le virus Zika et les infections associées ».
« Nos résultats permettent de mieux comprendre les caractéristiques clé de la bactérie qui protègent les cellules contre l’infection par le virus Zika, et pourraient également aider à identifier de nouvelles cibles antivirales », conclut le Dr. Sklan. Les chercheurs travaillent actuellement à découvrir le mécanisme par lequel le gène IFI6 inhibe l’infection.
Publication dans la revue Journal of Virology, 29 mai 2019
Auteur : Sivan Cohen-Wiesenfeld, PhD, Rédac’chef de la newsletter des Amis français de l’Université de Tel Aviv[:en]
The Zika virus has affected over 60 million people, mostly in South America. It has potentially devastating consequences for pregnant women and their unborn children, many of whom are born with severe microcephaly and other developmental and neurological abnormalities. There is currently no vaccine or specific treatment for the virus.
A new Tel Aviv University study uses a genetic screen to identify genes that protect cells from Zika viral infection. The research, led by Dr. Ella H. Sklan of TAU’s Sackler School of Medicine, was published in the Journal of Virology on May 29. It may one day lead to the development of a treatment for the Zika virus and other infections.
The study was based on a modification of the CRISPR-Cas9 gene-editing technique. CRISPR-Cas9 is a naturally occurring bacterial genome editing system that has been adapted to gene editing in mammalian cells. The system is based on the bacterial enzyme Cas9, which can locate and modify specific locations along the human genome. A modification of this system, known as CRISPR activation, is accomplished by genetically changing Cas9 in a way that enables the expression of specific genes in their original DNA locations.
« CRISPR activation can be used to identify genes protecting against viral infection, » Dr. Sklan says. « We used this adapted system to activate every gene in the genome in cultured cells. We then infected the cells with the Zika virus. While most cells die following the infection, some survived due to the over-expression of some protective genes. We then used next-generation sequencing and bioinformatic analysis to identify a number of genes that enabled survival, focusing on one of these genes called IFI6. A previous screen conducted by another research group had identified this gene with respect to its role vis-à-vis other viruses.
« IFI6 showed high levels of protection against the Zika virus both by protecting cells from infection and by preventing cell death, » Dr. Sklan continues. « If its yet unknown mode of action can be mimicked, it may one day serve as the basis for the development of a novel antiviral therapy to fight the Zika virus or related infections. »
Together with Dr. Nabila Jabrane-Ferrat of The French National Center for Scientific Research, Dr. Sklan moved the study of the identified genes into Zika-infected human placenta tissues, which serve as a gateway for viral transmission to the fetus. These genes were induced following infection, indicating they might play a protective role in this tissue as well.
« Our results provide a better understanding of key host factors that protect cells from ZIKV infection and might assist in identifying novel antiviral targets, » concludes Dr. Sklan. Moving forward, the researchers hope to discover the mechanism by which the IFI6 gene inhibits infection.
Research for the study was conducted by Dr. Anna Dukhovny of TAU’s Sackler School of Medicine, and bioinformatics analysis conducted by Kevin Lamkiewicz of Friedrich Schiller University. Part of the study was conducted during Dr. Sklan’s sabbatical in Prof. Jae Jung’s lab at the University of Southern California.
Published in Journal of Virology, May 29th 2019
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