Université de Tel-Aviv : le vol trouve son origine chez les dinosaures à plumes

Des dinosaures aux oiseaux modernes

« Cette découverte est d’une grande importance, car elle indique que le développement du vol chez les oiseaux et les dinosaures, tout au long de leur évolution, a été bien plus complexe qu’on ne le pensait. En fait, il est possible que certaines espèces aient développé des capacités de vol rudimentaires, et les aient perdues plus tard au cours de l’évolution », commente le Dr. Kiat, ornithologue spécialisé dans l’étude des plumes.

« La lignée des dinosaures s’est séparée des autres reptiles il y a 240 millions d’années », explique-t-il. « Après un laps de temps relativement court (à l’échelle de l’évolution), de nombreux dinosaures ont développé des plumes, structure organique particulière, légère et résistante, composée de protéines et servant principalement au vol et la conservation de la chaleur corporelle. Il y a environ 175 millions d’années, s’est développée une lignée de dinosaures à plumes appelée Pennaraptora, seule espèce à avoir survécu à l’extinction de masse qui a mis fin à l’ère du Mésozoïque, il y a 66 millions d’années, au cours de laquelle la plupart des autres dinosaures ont disparu, et qui a donné naissance aux oiseaux modernes. D’après ce que nous savons, le groupe des Pennaraptoras avait développé des plumes pour voler, mais il est possible qu’avec le changement des conditions environnementales, une partie de ces dinosaures aient perdu cette capacité, à l’instar des autruches et des manchots actuels ».

Au cours de l’étude, les chercheurs ont examiné neuf fossiles d’une sorte de petit dinosaure du nom d’Anchiornis appartenant au groupe des Pennaraptoras, découverts dans l’est de la Chine. Les conditions particulières qui régnaient dans la région au moment de leur fossilisation ont permis la conservation de leurs tissus mous, y compris les plumes de leurs ailes, et même de leur couleur : blanches avec un point noir à l’extrémité.  

Des plumes de 160 millions d’années qui racontent une histoire

C’est là qu’intervient un détail qui peut sembler technique et mineur, mais s’est avéré d’une importance cruciale : le renouvellement du plumage. « Les plumes poussent pendant deux à trois semaines jusqu’à atteindre leur taille définitive, puis elles se détachent des vaisseaux sanguins qui les nourrissent. Avec le temps, elles s’usent, finissent par tomber et sont remplacées par de nouvelles », explique le Dr. Kiat. « Ce processus de renouvellement des plumes est révélateur : les animaux ailés qui dépendent du vol et des plumes qui le rendent possible renouvellent celles-ci de façon ordonnée et progressive, qui maintient la symétrie de leurs ailes et leur permet de continuer à voler même pendant cette période. En revanche, chez les oiseaux qui ne sont pas capables de voler, ce processus de renouvellement est plus aléatoire et désordonné. Ainsi, la manière dont les plumes sont remplacées nous indique si l’animal ailé est capable de voler ».

L’observation de la couleur des plumes conservées dans les fossiles a permis aux chercheurs d’identifier les nouvelles plumes en cours de croissance, dont le point noir s’écartait de la bande du bord. Un examen attentif des nouvelles plumes des neuf fossiles a révélé que leur renouvellement ne s’était pas effectué de façon ordonnée et symétrique.

« Grâce à ma connaissance des oiseaux modernes, j’ai reconnu le schéma de remplacement des plumes chez ces dinosaures, qui indique qu’ils ont probablement perdu la capacité de voler. Il s’agit d’une découverte particulièrement rare et passionnante : la préservation de la couleur des plumes nous a offert une occasion unique d’identifier une caractéristique fonctionnelle de ces créatures anciennes, et pas seulement la structure corporelle qu’on retrouve dans les fossiles qui comprennent uniquement des squelettes et des os. Elle peut bouleverser toutes nos connaissances sur l’origine du vol. L’Anchiornis rejoint ainsi la liste des dinosaures qui bien que couverts de plumes étaient incapables de voler, et souligne la complexité et la diversité de l’évolution des ailes chez les animaux ailés ».

 source Amis français de l’université de Tel-Aviv

Publications dans Communications Biology des éditions Nature