Une étude révolutionnaire menée par le Dr Eran Perlson et Shani Gluska de la Faculté de médecine et de l’École des neurosciences de l’Université de Tel-Aviv, en collaboration avec l’Institut Friedrich Loeffler en Allemagne, a montré pour la première fois le mécanisme précis emprunté par le virus de la rage pour pénétrer le système nerveux central et paralyser les organes du corps.
Les résultats de l’étude, publiés dans la revue PLoS Pathogens, pourraient permettre d’envisager un traitement de cette maladie mortelle ainsi que d’autres troubles neurodégénératifs qui présentent des perturbations semblables.
Un pirate terrestre meurtrier
« La rage, non seulement utilise l’appareil du système nerveux, mais de plus elle le manœuvre pour se déplacer plus rapidement à l’intérieur du corps » explique le Dr Perlson. « Nous avons montré que le virus de la rage pénètre dans les neurones du système nerveux périphérique en se liant à un récepteur du facteur de croissance des nerfs, protéine qui se déplace le long du neurone, assurant sa survie, appelé p75. Son déplacement est même beaucoup plus rapide que celui de son ligand endogène ».
Pour suivre le trajet du virus dans le système nerveux, les chercheurs ont développé des neurones sensoriels en laboratoire et traqué le trajet parcouru par ses particules à l’aide d’un vidéomiscroscope. Ils ont pu observer comment le virus de la rage détourne le ‘train’ transportant les molécules de protéines le long du neurone, le conduisant droit vers la moelle épinière, puis de là, emprunte ‘le premier train disponible’ pour le cerveau, où il exerce ses ravages avant de se propager à travers le reste du corps, anéantissant les organes un à un.
Manipuler le mécanisme à des fins thérapeutiques
« Les neurones comprennent de longs prolongements ou axones qui transmettent les signaux électriques vers les organes et transportent des protéines » explique le Dr Perlson. « Le transport axonal est un processus délicat et crucial pour la survie des neurones, et sa perturbation peut conduire à des maladies neurodégénératives. C’est pourquoi comprendre comment un virus comme celui de la rage manipule ce mécanisme pourra nous aider, d’une part à rectifier le processus, et de l’autre à le manier nous-mêmes pour nos propres besoins thérapeutiques. En effet, il est tentant d’utiliser ce même mécanisme pour introduire des médicaments ou des gènes dans le système nerveux».
En mettant en évidence la manière dont le virus ‘détourne les trains de neurones’ pour atteindre ses organes cibles avec une vitesse et une efficacité maximales, les chercheurs espèrent donc aider au contrôle de l’appareil de transport neuronal afin de traiter à la fois la rage et d’autres maladies neurodégénératives. Selon le Dr Perlson, « Les perturbations du système de train de neurones contribuent également à des maladies neurodégénératives, comme l’Alzheimer, le Parkinson, et la sclérose latérale amyotrophique (SLA). C’est pourquoi une meilleure compréhension de la manière dont ces trains de neurones travaillent pourraient conduire à de nouveaux traitements de ces troubles ».