Le Pr Noah Dana-Picard, chercheur émérite, président de la Chaire Roland et Astrid Dana-Picard pour l’éducation, les mathématiques et le judaïsme au Lev Academic Center (Machon Lev), explique ici les règles du chabat… dans l’espace :
Le sonde lunaire Beresheet a fait les gros titres au début du mois d’avril. Elle est la première dans l’histoire à avoir été construite et envoyée par un organisme privé. A l’origine, ce projet a été envisagé par l’association SpaceIL pour participer au concours Google Lunar X Prize. Même après l’abandon du concours par Google, SpaceIl a continué. Le concours continue par le X Prize le sponsor Google s’est retiré du concours. L’association SpaceIL a reçu 1 M$ pour avoir déposé la sonde sur la Lune le 11 avril 2019.
Ariel Gomez est ingénieur systèmes, membre de l’équipe SpaceIl. A ce titre, il a participé à toute l’élaboration du projet et a suivi la navigation point par point. Il a été formé aux métiers de l’ingénieur au Centre Académique Lev, à Jerusalem (Jerusalem College of Technology – JCT). A un certain point du développement, il a fait appel à un autre ancien élève de JCT, le Rav Shraga Dahan, pour aider à résoudre un problème que personne en Israël n’avait encore rencontré.
Les satellites envoyés dans l’espace par Israël sont tous des satellites liés à la sécurité du pays. Beresheet est un projet privé, totalement civil, sans aspect d’urgence ni sécuritaire. Le vol de Beresheet vers la Lune était prévu pour durer deux mois. Comment peut-on gérer un tel projet pendant Chabat ?
C’est là que le Rav Dahan est entré en piste. Il a bien étudié les aspects technologiques et s’est adressé à de grands décisionnaires. La décision finale a été prise par le Grand-Rabbin d’Israël, le Rav Its’hak Yosef, qui dans une longue lettre a décrit tous les détails à respecter. En particulier, l’équipe de SpaceIL a expliqué clairement aux deux associés, la NASA et SpaceX (la société de Elon Musk), que le décollage et l’arrivée sur la Lune ne devraient pas avoir lieu moins d’un jour et demi avant Chabat. Ceux-ci ont bien compris l’importance que le Chabat avait pour l’équipe israélienne. Un autre impératif était de ne pas prévoir de manœuvre pendant Chabat. Cela a nécessité des calculs supplémentaires pour déterminer la trajectoire (une partie du travail de Ariel Gomez), et aussi augmenté légèrement la consommation de carburant. Cela a été fait, en prenant en compte que chaque gramme dans l’espace coûte une fortune.
Enfin, il est impossible de ne pas suivre en temps réel ce qui se passe. Il a donc fallu assurer une permanence en salle de contrôle. Pour ce faire, un clavier d’ordinateur à la technologie particulière a été utilisé. Ce clavier, basé sur des relais optiques et sur le principe connu dans la Halakha juive sous le nom de “Gramma”, a été développé par un chercheur du JCT, le DR Shimon Mizra’hi.
Mardi dernier, 11 juin, Ariel Gomez et le Rav Shraga Dahan, ont été invités par la Chaire de recherche en Torah et Science et par le Bet Midrash de JCT, pour donner une conférence aux étudiants de JCT. Ils ont décrit différentes facettes du projet, sur Terre et dans l’espace, expliquant à la fois les aspects technologiques, comment on envoie un vaisseau dans l’espace, comment on le gère, où les lois de Kepler fonctionnent, et aussi et surtout l’aspect Juif de la mission.
Signalons ici que la sonde Beresheet a emporté sur la Lune un Tanakh (Bible), et un livre de prières avec Tehilim (les Psaumes).
Parmi les produits de la mission Beresheet figurent des avancées technologiques et l’ouverture d’un champ d’études de Torah : dans le respect de la tradition juive et de la Halakha, établir le cadre de l’exploration spatiale. Un pas de plus dans ce sens a été fait par SpaceIL, après les questions posées en son temps par Ilan Ramon.
Pr Noah Dana Picard