Le Prof. Malka Cohen-Armon de la Faculté de médecine de l’Université de Tel Aviv, en collaboration avec le Prof. Tamar Peretz de l’Institut d’oncologie du Centre Hadassah à Ein Kerem, le Prof. Shai Izraeli et le Dr. Talia Golan du Centre de recherche sur le cancer de l’Hôpital Sheba à Tel-Hashomer, a découvert une nouvelle méthode de destruction ciblée des cellules cancéreuses agressives exploitant un mécanisme naturel de suicide cellulaire qui existe dans toutes les cellules. L’étude ouvre un nouvel espoir pour le développement de médicaments particulièrement efficaces adaptés à une variété de tumeurs malignes résistantes aux traitements actuels.
NDLR ISI Mag : La Prof. Malka Cohen-Armon est diplômée du Technion de Haïfa où elle a passé une maîtrise en chimie et un doctorat en biophysique et en électrophysiologie (étude des phénomènes électriques et électrochimiques qui se produisent dans les cellules ou dans les tissus des organismes vivants, en particulier dans les neurones et les fibres musculaires.). Elle a fait ensuite son postdoctorat sur les récepteurs muscariniques du cerveau dans le laboratoire du Prof. M. Sokolovsky (Département de neurobiochimie, Sciences de la vie), à l’Université de Tel Aviv.
Prof. Cohen-Armon
« Nous avions découvert dès 2009 que des molécules dérivées du phénanthrène (hydrocarbure aromatique dit tricyclique) tuent efficacement les métastases du cancer du sein qui ne réagissent pas aux thérapies traditionnelles », explique le Prof. Cohen-Armon. « Nous avons ensuite examiné l’effet de ces molécules sur d’autres types de tumeurs malignes résistantes aux traitements, comme le cancer de l’ovaire, le cancer du côlon, le cancer du pancréas, une forme rare du cancer du cerveau et le celui du poumon, et constaté que ces molécules parvenaient à les détruire dans les 48 à 96 heures. En parallèle, nous avons constaté que la procédure ne cause aucun dommage aux cellules saines, et que la lésion des cellules cancéreuses se produisait pendant la division cellulaire (mitose). Suite à ces résultats, nous avons cherché à étudier ce processus de destruction ».
Dr. Talia Golan
Un mécanisme naturel de « suicide cellulaire »
Pour révéler ce mécanisme, les chercheurs ont passé en revue la réaction au phénanthrène de toutes les protéines des cellules connues pour être associées au processus de la division cellulaire. Ils sont ainsi parvenus à identifier un certain nombre de protéines spécifiques qui subissaient des modifications sous l’influence du phénanthrène dans les cellules cancéreuses, alors qu’elles ne lui réagissaient pas du tout dans les cellules saines. Le Prof. Cohen-Armon explique : « dans un processus de division cellulaire normal, les chromosomes de la cellule mère se reproduisent de manière précise, les deux jeux de chromosomes générés s’alignant l’un en face de l’autre le long d’une ‘broche’ (axe avec deux pôles, généré au sein de la cellule mère). Les protéines que nous avons identifiées sont responsables de la construction de la broche et de l’agencement des chromosomes lors de la division. Dans les cellules cancéreuses, le phénanthrène perturbent leur activité, entraînant la formation d’une petite broche appauvrie et déformée avec des chromosomes dispersés. Pour éviter la division cellulaire anormale, la cellule va alors se « suicider » : un mécanisme naturel d’autodestruction, qui se déclenche dans toute cellule qui ne se divise pas normalement, se met alors en œuvre dans la tumeur maligne, et c’est ainsi que les cellules cancéreuses périront par le traitement. De plus, dans la mesure où la lésion se produit dans la phase de division cellulaire, l’efficacité du traitement augmentera, car les cellules cancéreuses, surtout les tumeurs malignes les plus agressives se divisent à un taux élevé ».
Prof. Shai Izraeli
Des résultats prometteurs
Après avoir examiné ce mécanisme dans des cultures cellulaires, les chercheurs l’ont testé sur des souris de laboratoire. Les résultats ont été prometteurs: suite au traitement par le phénanthrène, la croissance tumorale a été interrompue, et deux semaines plus tard, les tumeurs des souris traitées étaient beaucoup plus réduites que celles du groupe témoin resté sans traitement.
« Nous pensons avoir identifié un nouveau mécanisme particulièrement efficace pour le traitement du cancer, qui pourrait convenir à une variété de tumeurs malignes », a conclu le Prof. Cohen-Armon. « Nous avons l’intention de développer des molécules qui interfèrent avec l’activité des protéines que nous avons identifiés, exploitant ainsi un mécanisme naturel d’autodestruction qui intervient en cas de division cellulaire anormal pour détruire les cellules cancéreuses agressives. Par la suite, nous examinerons comment utiliser ces molécules comme médicament pour les humains».
Publication dans Oncotarget
Auteur, Sivan Cohen-Wiesenfeld, PhD Rédactrice en chef de la newsletter Université de Tel-Aviv/AFAUTA