Anna Erschler figure parmi les lauréates et lauréats 2020 de la médaille d’argent du CNRS, qui distingue des chercheurs et des chercheuses pour l’originalité, la qualité et l’importance de leurs travaux, reconnus sur le plan national et international.
Anna Erschler, 44 ans, est une mathématicienne russe. Elle est directrice de recherche au CNRS à l’ENS à Paris. Elle étudie initialement les mathématiques à l’Université de Saint-Pétersbourg dont elle est diplômée en 1999 puis à l’Université de Tel Aviv. En 2001, elle soutient une thèse intitulée Geometric and probabilistic properties of wreath products à l’université de Saint-Petersbourg sous la direction de Anatoli Vershik. L’année suivante, elle devient post-doctorante à l’Institut de mathématiques Steklov de Saint-Petersbourg, ensuite elle rejoint l’IHES à Paris puis l’IRMAR à Rennes. En 2003, elle est recrutée au CNRS comme chargée de recherche d’abord affectée à l’Université de Lille puis à l’Université Paris-Sud (à partir de 2006) ; en 2013, elle est promue directrice de recherche. Depuis 2014, elle occupe cette fonction à l’ENS (département de mathématiques et applications). Ses recherches portent sur la théorie des probabilités et sur la théorie des groupes géométriques, en particulier les marches aléatoires sur des groupes (source WIKI.
Anna Erschler est directrice de recherche au CNRS, affectée au Département de mathématiques et applications de l’École normale supérieure – PSL1. Elle a soutenu sa thèse en 2001 à l’Université de Saint-Pétersbourg puis, après un post-doctorat à l’Institut des hautes études scientifiques2 et à l’Institut de recherche mathématique de Rennes3, elle est recrutée au CNRS. Elle a été conférencière invitée à l’International Congress of Mathematicians (ICM) en 2010. Elle est soutenue par l’ERC pour son projet consolidator Grant GrolsRan Growth, Isoperimetry and Random walks on Groups qui a succédé en 2017 à son projet starting grant RAWG Random walks and Growth of Groups.
Le domaine de recherche d’Anna Erschler est la géométrie des groupes, qu’elle aborde en particulier sous un aspect probabiliste, établissant un lien entre des propriétés géométriques des groupes et les marches aléatoires sur ces groupes.
Soit G un groupe de type fini engendré par un ensemble fini S et V un sous-ensemble de G. Le bord de V est l’ensemble des éléments de V à distance 1 du complémentaire de V dans G. La fonction de Følner de G est une fonction sur l’ensemble des entiers naturels non nuls. Sa valeur en l’entier n et le nombre de sous-ensembles finis V de G dont le cardinal du bord est majoré par le cardinal de V divisé par n. Dans un travail4 publié en 2003, Anna Erschler donne des asymptotiques de la fonction de Følner pour un ensemble de groupes. L’inégalité isopérimétrique pour les produits en couronne, résultat principal de ce travail a eu des développements récents, notamment dans des travaux5 de Brieussel et Zheng qui feront l’objet d’une actualité scientifique dans une prochaine Lettre de l’Insmi.
Soit G un groupe de type fini engendré par un ensemble fini S. La longueur (pour la métrique des mots) d’un élément g de G est le plus petit nombre d’éléments de S ou de son symétrique dont le produit est g. Comprendre la croissance d’un groupe, c’est comprendre le comportement de la fonction qui à tout entier naturel associe le nombre d’éléments du groupe de longueur inférieure à cet entier.
À une marche aléatoire sur un groupe est associé son bord de Poisson. La non-trivialité de ce bord de Poisson, équivalente à l’existence de fonctions harmoniques (pour la mesure qui définit la marche aléatoire du groupe) bornées et non constantes, est lié à la croissance du groupe, c’est-à-dire à la croissance de la taille des boules de rayon entier pour la métrique des mots. En 2004, Anna Erschler publie6 une nouvelle méthode pour estimer l’entropie d’une marche aléatoire. Grâce à ce critère, elle démontre l’existence de variétés compactes à groupe fondamental moyennable ayant un revêtement universel admettant des fonctions harmoniques bornées non constantes. Elle démontre qu’un groupe résoluble de type fini possède une mesure symétrique avec un bord de Poisson non trivial si et seulement si ce groupe n’admet pas de sous-groupe d’indice fini nilpotent. Elle donne les premiers exemples de groupes de type fini dont le bord de Poisson est non trivial.
Toujours en 2004, Anna Erschler publie7 une méthode utilisant le bord de Poisson pour donner des bornes inférieures de la croissance de groupes, fournissant alors les premiers exemples de groupes à croissance sous-exponentielle à bord de Poisson non trivial. Les groupes pour lesquels le bord de Poisson est trivial pour toute mesure non dégénérée ont récemment été décrits dans un travail8 de Frisch, Hartman, Tamuz et Vahidi Ferdowsi.
En 2011, Anna Erschler résout9 une conjecture de Kaimanovich et Vershik relative au bord de Poisson du produit en couronne de ℤd avec un groupe de type fini non trivial lorsque d⩽5. Ce résultat a été généralisé par Lyons et Peres dans un travail10 à paraître au Journal of the European Mathematical Society.
Un groupe est à croissance polynômiale si et seulement s’il n’admet pas de sous-groupe d’indice fini nilpotent. Tous les groupes résolubles ou linéaires ont une croissance polynômiale ou exponentielles. Les premiers exemples de groupes à croissance intermédiaire (c’est-à-dire de croissance strictement comprise entre croissance polynomiale et croissance exponentielle, par exemple exp(n0,767)), sont dus à Grigorchuk en 1984. Ces exemples portent maintenant le nom de groupes de Grigorchuk. En collaboration avec Laurent Bartholdi, Anna Erschler a construit11 en 2012 les premiers exemples de groupes de croissance intermédiaires dont l’asymptotique de croissance est explicitement connue : pour tout entier naturel k, ils montrent l’existence d’un groupe de torsion de type fini dont la croissance est équivalente à exp(n1−(1−α)k) et d’un groupe sans torsion de type fini dont la croissance est équivalente à exp(log(n)n1−(1−α)k) où α=log(2)log(2η), avec η la racine réelle du polynôme X3+X2+X−2.
Récemment, Anna Erschler s’est penchée sur des questions de nature plus géométrique. Un groupe possède la propriété HFD de Shalom si toute représentation de ce groupe, dans un espace de Hilbert, orthogonale et de cohomologie réduite de degré 1 non nulle contient une sous-représentation de dimension finie. Avec Narutaka Ozawa, Anne Erschler donne12 une condition suffisante portant sur la croissance des cocycles harmoniques le long de marches d’un groupe pour qu’il satisfasse la propriété HFD de Shalom.
Source CNRS