Technion (Israël) : produire de l'hydrogène propre et sûr à 98,7% par fractionnement de l'eau

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La technologie de fractionnement de l’eau E-TAC améliore l’efficacité énergétique du processus de production d’hydrogène à un niveau sans précédent, 98,7%, et réduit considérablement les émissions de dioxyde de carbone. La société H2Pro basée sur ce développement s’occupe de la commercialisation.

Les chercheurs du Technion ont mis au point une technologie de production d’hydrogène propre, peu coûteuse et sûre qui améliore de façon spectaculaire l’efficacité de la production d’hydrogène (d’environ 75% actuellement) avec une efficacité énergétique sans précédent de 98,7% !

L’étude a été menée dans le cadre du programme Énergie Nancy et Steven Grand Technion (GTEP) par le Pr Avner Rothschild de la Faculté des sciences des matériaux et du génie et le Pr Gideon Grader de la Faculté de génie chimique, en compagnie du Dr Chen Dotan et de la doctorante Abigail Landman. Elle a été financée entre autres par la Commission européenne (programme-cadre de l’UE 2020).
 
L’électrolyse a été découverte il y a plus de 200 ans et connait régulièrement depuis des améliorations. Les chercheurs du Technion viennent de présenter un changement radical qui permettra de proposer de l’hydrogène bon marché, propre et très sûr. Selon eux, le nouveau procédé pourrait révolutionner la production d’hydrogène en faisant appel à des énergies propres et renouvelables telles que l’énergie solaire ou éolienne.

conventional water splitting process (left) and the ETAC water splitting process (right). In conventional water splitting, the hydrogen and oxygen are produced simultaneously and in the same cell, separated by a membrane. By contract, in the ETAC process the hydrogen and oxygen are produced in two separate steps: the first step a low-temperature electrochemical step, in which only hydrogen is produces; the second step is a high-temperature step, in which only oxygen is produced in a spontaneous chemical reaction
Conventional water splitting process (l.) and ETAC water splitting process (r.). In conventional water splitting, the hydrogen and oxygen are produced simultaneously and in the same cell, separated by a membrane. By contract, in the ETAC process the hydrogen and oxygen are produced in two separate steps: the first step a low-temperature electrochemical step, in which only hydrogen is produces; the second step is a high-temperature step, in which only oxygen is produced in a spontaneous chemical reaction

 
Les chercheurs ont mis au point ce procédé nouveau et unique, le fractionnement de l’eau E-TAC (fractionnement de l’eau électrochimique par activation thermique), basé sur une action cyclique. A la première étape, la cathode produit de l’hydrogène et l’anode modifie la composition chimique sans produire d’oxygène. A la deuxième étape, la cathode est passive tandis que l’anode produit de l’oxygène. À la fin de la deuxième étape, l’anode revient à son état initial et le cycle recommence. Sur la base de cette technologie, les chercheurs ont créé la start-up H2Pro, qui s’occupe de la traduction en une application commerciale.
 
Dans le monde, environ 65 millions de tonnes d’hydrogène sont produites chaque année d’une valeur d’environ 130 milliards de dollars, soit une économie d’énergie d’environ 9 exa-joules (EJ), ou 2 600 térawatts (TWh). Ces volumes sont en augmentation constante et devraient tripler ces 20 prochaines années. Comme l’électricité, l’hydrogène est principalement un vecteur énergétique produit à partir d’une autre ressource. Actuellement, pour des raisons économiques, il est issu à 95 % du gaz naturel.
Environ 53% de l’hydrogène produit aujourd’hui est utilisé pour la production d’ammoniac, pour les engrais et d’autres matières, 20% par les raffineries, 7% pour la production de méthanol et 20% pour d’autres utilisations. À l’avenir, l’hydrogène devrait être utilisé dans d’autres applications, dont certaines en phase de développement accéléré : l’hydrogène en tant que carburant pour véhicules électriques contenant des piles à combustible (FCEV), l’hydrogène en tant que carburant pour le stockage d’énergie à partir de sources renouvelables (P2G), l’hydrogène industriel et domestique…
 
L’hydrogène est principalement produit par l’extraction de gaz naturel dans le processus, ce qui libère environ 10 tonnes de CO2 par tonne d’hydrogène et est donc responsable d’environ 2% des émissions totales de CO2 dans l’atmosphère dues à l’activité humaine. Il faut donc d’urgence trouver des solutions de remplacement propres et respectueuses de l’environnement pour la production d’hydrogène.
 
L’électrolyse de l’eau est la principale technologie pour produire de l’hydrogène proprement et sans émission de CO2. La molécule d’eau, soumise à un courant électrique au travers de deux électrodes, se dissocie en oxygène et hydrogène gazeux : c’est l’électrolyse. Le courant électrique dissocie la molécule d’eau en ions hydroxyde (OH)- à la cathode et en protons H+ à l’anode. Les protons acceptent des électrons dans une réaction d’oxydation en formant de l’hydrogène gazeux.
 
La technologie de fractionnement de l’eau E-TAC présente des avantages importants par rapport à l’électrolyse :
1. Séparation chronologique absolue entre la production d’hydrogène et la production d’oxygène. Implications :

A. Élimine le besoin de la membrane qui traverse l’anode et la cathode dans la chambre d’électrolyse. Soit une économie importante par rapport à l’électrolyse, car la membrane est chère, complique le processus de production et nécessite l’utilisation d’eau distillée et un entretien régulier pour éviter sa congélation.

B. Un procédé sûr, qui évite les risques d’explosion oxygène-hydrogène, qui peut survenir lors du processus d’électrolyse normal si la membrane de séparation n’est pas complètement opaque.

C. L’utilisation actuelle de membranes limite la pression dans le processus de production d’hydrogène. La technologie du Technion permet de resserrer la membrane, ce qui permet de comprimer l’hydrogène au stade de la production. Cela économise également une partie des coûts importants associés à la compression retardée de l’hydrogène.

2. Avec ce nouveau procédé, l’oxygène est généré lors d’une réaction chimique spontanée entre l’anode chargée et l’eau, sans que le courant électrique ne soit appliqué à ce stade. Celà réduit les besoins en électricité au stade de la génération d’oxygène et augmente l’efficacité du processus d’environ 75% en utilisant les méthodes conventionnelles pour un rendement énergétique sans précédent : 98,7%.

3. La technologie E-TAC devrait permettre de réduire les coûts d’exploitation et les coûts d’équipement. H2Pro estime que le coût de production d’hydrogène dans E-TAC sera d’environ la moitié du coût des équipements basés sur les technologies existantes. Les premières estimations indiquent la possibilité de produire de l’hydrogène à l’échelle industrielle à des coûts compétitifs par rapport à la production de gaz naturel (SMR, Steam Methane Reforming), sans émissions de CO2 dans l’atmosphère.

Les développeurs, les Prs Gideon Grader, Avner Rothschild et Chen Dotan, cofondateurs de Viber, ont fondé H2Pro, qui s’occupent de la commercialisation de la nouvelle technologie. Le Technion a utilisé le capital amené par Hyundai, qui emploie plus de 20 personnes, dont la plupart sont diplômées du Technion.
L’étude a été financée par le programme Énergie Nancy et Steven Grand Technion (GTEP), la fondation Ed Sattell, la Fondation Adlis, le ministère de l’Énergie et la Commission européenne (programme-cadre de l’UE 2020).

Publication dans Nature Energy, 13 septembre 2019
 
Traduction/adaptation Esther Amar pour Israël Science Info
 

 

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